"Voltaire disait : « J’ai décidé d’être heureux parce que c’est bon pour la santé."
Le
Film_
Date
Juin 2020
Réalisation
Olivier Sautet
Cadreurs
Olivier Sautet - Robin Christol
Photographie
Matt Georges
Histoire
En temps normal, un trip MANERA est toujours associé à une destination atypique dans un endroit relativement froid. Le Kamchatka, l’an dernier, était juste magique. Cette année devait l’être tout autant, mais en 2020 le mot normal a pris un tout un autre sens…
Une pandémie et 2 mois de quarantaine plus tard tous nos plans ont dû être modifiés à la dernière minute. Affranchis de nos attestations nous décidons de suivre le vent et d’aller à la rencontre des meilleurs riders locaux.
Nous nous retrouvons alors avec Matt, le photographe, un samedi devant les bureaux de F-ONE/MANERA, en face du camping-car de Francis de 1994 qui allait être notre maison roulante pour les deux semaines à venir...
"Les prises de vue aériennes ont été réalisées avec l'autorisation de la DGAC et Préfecture par un télépilote affilié DGAC."
Lire l'histoire"Elle est belle notre France, on a tendance à l’oublier et il aura fallu une pandémie pour que je vienne la découvrir !"
Musiques
-
Douce France
- Charles Trenet - -
Swift ANIMALS
- Saint-Saëns - -
OMEGA
- Gyongyhaju Lany - -
Sposa son disprezzata
- Cecilia Bartoli -
"Nous avons coutume de chercher le paradis toujours un peu plus loin et cette année nous l’avons trouvé chez nous".
"Cette fois-ci les prévisions sont vraiment au rendez-vous."
“À l’heure où le monde entier est confiné (...), il y a nous, quatre humains dans un camping-car vivant du vent et profitant de ce que la France a à nous offrir.”
Galice
LA MER, LE VENT ET LE CERF-VOLANT : L'histoire
Intro
En temps normal, un trip MANERA est toujours associé à une destination atypique dans un endroit relativement froid. Le Kamchatka, l’an dernier, était juste magique. Cette année devait l’être tout autant, mais en 2020 le mot normal a pris un tout un autre sens…
Une pandémie et 2 mois de quarantaine plus tard tous nos plans ont dû être modifiés à la dernière minute. Affranchis de nos attestations nous décidons de suivre le vent et d’aller à la rencontre des meilleurs riders locaux.
Nous nous retrouvons alors avec Matt, le photographe, un samedi devant les bureaux de F-ONE/MANERA, en face du camping-car de Francis de 1994 qui allait être notre maison roulante pour les deux semaines à venir.
De l’extérieur, sa vieillesse le rendait assez inquiétant, et à l’intérieur en revanche le plaquage bois lui donnait un côté assez sympa.
À bord de notre camping-car
Le vent se déchaîne, on décide alors de faire un premier stop sur un spot local où nous retrouvons la Méditerranée comme nous l’aimons ; vent fort, pluie et vagues. Après une bonne session, le soleil est de retour, on décide alors de reprendre la route.
"Nous retrouvons la Méditerranée comme nous l’aimons; vent fort, pluie et vagues."
Un petit coup de klaxon et nous voilà en route vers la côte ouest à la recherche du vent, yihaa ! La liberté d’aller où le vent nous mène, j’ai rêvé de faire un trip comme ça depuis des années !
Dès les premiers kilomètres on sent la puissance du camping-car assez limitée, et Matt au volant de la bête freine par réflexe devant le premier radar, sauf qu’on était déjà à 80km/h… Obligé de rétrograder en 3ème pour garder une vitesse décente. À ce moment-là je regarde Matt et on a tous les deux compris qu’on allait passer beaucoup de temps sur la route !
Sur le papier, suivre le vent à quelque chose de grisant et d’excitant, mais en réalité c’est plus difficile que ce que l’on pense. Les cartes météo s’actualisent toutes les 2h et à chaque fois nous montre une prévision différente.
On décide alors de faire un second stop sur l’ile d’Oléron. Oscar, le rider local nous a parlé d’une lagune de flat idéale pour du freestyle et justement le vent est dans la bonne orientation pour les deux prochains jours. On tente d’y arriver avant la nuit, j’ai l’impression de faire une course contre la montre avec un tracteur mais petit à petit on commence à s’habituer au bruit ronronnant du moteur Fiat J300.
Évidemment on arrive pile à la tombée de la nuit donc trop tard pour se mettre à l’eau mais le spot a du potentiel.
Maxime, le deuxième rider, nous rejoint dans la nuit avec son Van. Il a dû attendre que ses frontières ré-ouvrent pour pouvoir passer. L’équipe est quasi au complet, il manque juste Marcela qui bataille avec son ambassade pour pouvoir prendre un vol du Portugal jusqu’en France mais il semblerait que ce soit un peu compromis pour elle… Max et moi sommes les deux riders, Matt et olivier l’équipe media ! Une team restreinte pour un trip spécial mais qui s’annonce génial.
On passe deux jours sur cette lagune à exploiter le moindre vent, même si cet endroit n’a rien d’exceptionnel, c’est un bon début de trip !
En route vers le Nord
On continue notre route vers le nord, prochain stop Noirmoutier. A 80km/h on n’y arrive pas tout de suite, alors on profite du paysage et on planifie les prochains jours.
Une fois sur place, comme on ne s’est bien sûr pas renseigné au préalable, on découvre que la totalité de la presqu’île est interdite au kite à cette période… Notre seule option est de rider vers la gois c’est à dire une route immergé à marée haute et qui à marée basse forme un spot de freestyle world class !
Évidemment ce jour-là le vent est parallèle à la route au lieu d’être perpendiculaire... En bon rider assoiffé de ride on décide de se mettre tout de même à l’eau avec Max.
"La presqu’île est interdite au kite à cette période…"
Le panneau « Vase » qui trône au début de la route m’intrigue, à peine je fais un pas sur le côté pour dérouler mes lignes que je m’enfonce jusqu'au-dessus du genou. Le panneau prend alors tout son sens.
On décolle tant bien que mal et le vent trop léger nous contraint à faire quelques bords et quelques tricks sans remonter au vent. On remontera par la route à pied avec nos ailes en l’air tout en saluant les passants qui se demandent pourquoi on fait du cerf-volant ici.
Bon Noirmoutier n’a pas l’air de vouloir de nous et le vent dans le coin non plus. Jouissant d’une liberté totale on décide donc de partir aussi tôt vers une nouvelle destination toujours plus au nord.
Toujours plus au Nord...
Sur la route je regarde scrupuleusement Google image et les cartes météo pour essayer de trouver des spots à la fois jolis, navigables et avec du vent, pas simple l’affaire. On décide alors d’appeler directement les locaux, car rien de mieux qu’un qui sait face à dix qui cherchent ! Etienne Lhote, notre baromètre Breton, qui possède une école de kite sur Quiberon, nous confirme de bonnes conditions pour les deux-trois jours qui arrivent. J’enclenche la quatrième et m’engage sur l’autoroute, on arrive, lui dit Olivier au téléphone !
"J’enclenche la quatrième et m’engage sur l’autoroute, on arrive, lui dit Olivier au téléphone !"
Le camping-car de Francis a l’air de tenir le coup, même si parfois l’essuie-glace tente de s’échapper on arrive toujours à le réparer avec un peu de scotch. À notre arrivée, le vent est un peu en retard, on se met alors à l’eau avec Max en surf sur la côte sauvage de Quiberon. Des conditions pas dingues mais après des heures de route rien de mieux que d’être dans l’eau.
Le lendemain le vent est là et la petite mer cote intérieur nous offre un spot de freestyle idéal. C’est reparti j’enfile mes boots et j’enchaine les tricks. Le confinement n’a pas eu que du bon pour nous kitesurfeur pro, je me sens un peu rouillé et j’ai du mal à retrouver les sensations mais Max lui s’en sort plutôt bien et pose des bon doubles handle-pass. Olivier et Matt sont contents les images vont être top. On est content aussi d’avoir ridé toute la journée.
Petite bière pour fêter ça au sunset tout de même. En Bretagne il faut savoir apprécier les sunsets quand ils sont là, car ils sont assez rares, mais quand tout s’aligne c’est juste magique !
"Bon les gars si je ne vois pas un barrel je ne filme pas."
Le jour suivant, un rangement du camping-car s’impose et Etienne nous offre même le luxe d’une douche dans son école. Quelle sensation incroyable après cinq-six jours d’enfin prendre une douche et se sentir propre.
On continue alors notre périple vers un nouveau spot et cette fois-ci les prévisions sont vraiment sexy. Crozon on arrive, et Etienne décide de nous suivre pour scorer ce swell qui s’annonce relativement costaud.
"La plage de la Palue en ligne de mire on fonce en se voyant déjà dans des barrels avec Max."
Première déconfiture en arrivant, une barrière à 2m nous empêche de passer sur le parking du spot… On se retrouve alors bloqués sur le parking du haut au milieu d’autres collègues Camping cariste.
D’en haut, on voit les lignes au large de l’océan, on se regarde avec Max avec une petite appréhension. On sait surfer mais quand c’est gros on n’aime pas trop. Olivier n’hésite pas à en rajouter une couche, « bon les gars si je ne vois pas un barrel je ne filme pas ». On descend la route qui mène au spot, et on découvre les vagues à marée basse. De l’extérieur elles ont l’air plutôt sympa, mais la houle est prévue en forte augmentation toute la journée jusqu’au lendemain. Je sors ma board de surf et max waxe une Mitu 5’6 qui lui servira de surf pour cette session.
En résumé, beaucoup de canards, et peu de vagues surfées mais quelques bon rushs d’adrénaline au take-off sur les bombes. On croise les doigts pour que demain le vent soit au rendez-vous.
Au réveil on se retrouve face à la tête endormie de notre breton favori, il nous sort : « alors les gars, prêts à prendre des montagnes d’eau sur la tête ? » Sur le coup j’ai un peu le stress qui monte, mais au final la session ne se déroule pas trop mal et même si je n’ai pris que quelques vagues c’était du pur bonheur!
Vers 10h le vent se met doucement en place. On prépare alors le matériel de surf kite car il semble que ce sera notre seule option pour filmer du kite dans les vagues sur ce trip. Je prends la 13m breeze et Etienne part en 12m Bandit. Le vent oscille entre douze et treize nœuds et avec le courant la session s’annonce complexe ! Je demande quand même à Etienne avant de partir : « Je mets un leash de board tu crois ? » Il me regarde étonné et il sort : « Si tu ne veux pas te noyer, c’est mieux oui ». Ok je vais mettre un leash alors.
La plage de la Palue est grande, très grande surtout à marée basse. On marche pour remonter au vent le plus possible et exploiter la moindre vague sur la descente.
J’ai du mal à bien surfer, Etienne lui s’en sort vraiment bien et en backside en plus, on sent l’expérience qui parle et heureusement qu’il nous a rejoint. Il enchaine les rollers à midi malgré que son aile vole à peine, c’est bluffant ! Je finis par rester sur les reformes du bord et à remonter à pied après avoir surfé trois-quatre vagues. J’en profite, alors, pour apprécier le paysage et les falaises qui sont juste magnifiques à Crozon.
"Elle est belle notre France, on a tendance à l’oublier et il aura fallu une pandémie pour que je vienne la découvrir !"
Sessions Bretonnes
Avant de partir pour une nouvelle destination je me mets à l’eau au lever du soleil en surf foil dans la baie de Goulien. Les houles s’enroulent doucement et sont parfaites pour le foil, avec un take off j’enchaine les vagues et je passe au milieu des surfeurs et standupeurs qui sont tous stupéfaits de ce nouveau support étrange.
Pas de douche et un croissant plus tard, nous voilà à nouveau en route, direction Brest où Amaury un gérant de shop local nous attend pour nous indiquer les spots du coin.
La ville avec un camping-car ce n’est pas simple, mais l’avantage c’est qu’on est tellement gros et large avec cet engin que tout le monde se pousse. Amaury nous montre sur la carte le spot et où se mettre à l’eau. C’est sur Plouguerneau que nous nous dirigeons alors en croisant les doigts pour que le soleil soit de la partie et fasse miroiter cette eau turquoise si incroyable en Bretagne.
Les cailloux arrondis éparpillés un peu partout créé des zones idéales pour le freestyle, j’ai un bon feeling sur cet endroit, qui est encore diffèrent de Crozon mais tout aussi joli.
Le soleil pointe le bout de son nez et le vent thermique se met en route, ni une ni deux, on gonfle nos 13m avec Maxime et Lazare, un freestyleur local du team qui nous a rejoint pour l’occasion. Le courant est fort mais on arrive à rejoindre la zone derrière les cailloux et on enchaine les tricks dans une eau bleu turquoise et un soleil digne d’une destination tropicale, la seule différence c’est qu’on est en combinaison 4/3mm.
Je vois Max poser des gros tricks et je me concentre pour exploiter le moindre bord et ne pas gaspiller la batterie des drones ou des caméras avec des chutes. Le vent faibli doucement jusqu'à tomber à zéro au bout de 2h de session.
Un repas bien mérité nous attend au restaurant en face du spot. On teste toutes les crêpes bretonnes de la région pour voir quelle ville fait les meilleures. Crozon a mis la barre très haute je dois dire !
Le mythique Mont Saint-Michel
Du freestyle, des vagues, du foil, du surf on commence à avoir tout ce qu’il faut pour faire une belle vidéo, et les photos sont toutes aussi belles. Mais il nous manque un petit quelque chose, un quelque chose qui rendrait la vidéo magique, qui lui donnerait cette magie que la France peut nous offrir.
Direction, le Mont Saint Michel, pour le coup ce shot là se prépare un petit peu. On essaye de demander à nos amis comment faire pour rider là-bas, quel est le bon vent, la bonne marée… Les avis divergent et au final on décide d’aller repérer par nous-mêmes.
La marée haute est prévue à 21h et il est possible de rider jusqu'à au moins 22h. Vu la chaleur on croise les doigts pour que le thermique se lève en fin d’après-midi et qu’on puisse rider autour.
"Il nous manque un petit quelque chose, un quelque chose qui rendrait la vidéo magique."
Je m’allonge sous un arbre à l’ombre en attendant que le vent se lève et que la marée remonte. Je regarde, alors, sur mon téléphone les péripéties de la création de ce lieu chargé d’histoire et je me dis au fond de moi que pour une fois la chance va être de notre côté. On attend, sous notre petit arbre, face à l’endroit où on pourra décoller et marcher jusqu'à l’eau. Max y croit aussi et puis en foil et en 15m il nous faut juste sept-huit nœuds pour être à fond.
18h30 on décide de se mettre en combi, une légère brise s’est levée et nous remplit d’espoir pour cette session. Max et moi décollons nos deux halo 15m et partons à pied rejoindre l’eau. Le chemin est rempli de vase, et à notre arrivée proche de l’eau on est en nage dans notre combinaison.
Premier problème le courant se rapproche d’une rivière en crue et la couleur de l’eau ne nous permet pas de jauger la profondeur avec nos foils, sympa! Je regarde Max et je me dis que ça va être chaud. On décide de poser nos ailes au bord de l’eau et d’attendre que la marée monte encore, les fesses dans la vase, contemplant ce château d’une beauté déconcertante.
Vers 19h30 l’eau est suffisamment haute je fais une première tentative de mise à l’eau mais le courant est trop fort, je me fais ravaler vers le bord et arrive tant bien que mal à garder mon aile en l’air. Le vent doit osciller entre cinq et six nœuds, Max me montre une sorte de baïne qui se crée sur le côté où le courant tourbillonne à l’intérieur. Je retente une nouvelle fois, mon aile tiens à peine en l’air, j’envoie, je pompe un peu, ça y est je suis parti j’en reviens pas !
Je me retourne et Max m’emboite le pas et part à son tour. On a réussi, on kite devant le Mont Saint Michel. Les drones fusent au-dessus de notre tête, quel moment magique. Je ne sens quasiment pas de vent sur mon visage et le courant nous aide. Petit à petit le stress de tomber s’éloigne et je me mets à profiter du moment.
On tire des bords à deux avec Max, devant, sur les côtes, en espérant que Matt et Olivier ne rate rien de ce qui est en train de se passer.
Le soleil descend et se transforme en une boule de feu, faisant miroiter les différents tons orangés sur les vitraux du Mont. Quelques personnes encore à l’intérieur nous font des signes, c’est pas tous les soirs que deux kite surfeurs passent devant il faut dire.
On ne peut pas s’empêcher de lâcher des petits cris de joie avec Max, un moment pareil ça restera gravé à jamais dans nos mémoires. Le soleil fini par se coucher et laisse apparaître dans le ciel des reflets roses et turquoises. On décide de rentrer et avec la marée haute on s’amuse dans les chenaux qu’on avait pris à pied à l’aller.
Je n’arrive pas à m’arrêter de sourire en repensant à ce qu’il vient de se passer, quelle journée… C’est aussi pour ça qu’on fait du kite, pour vivre des moments pareils !
Retour dans le Sud
Un dernier stop à St Malo pour profiter de la piscine naturelle, de la ville et notre voyage sur les côtes françaises touche à sa fin. La redescente va être longue à 80km/h, mais avec le sentiment d’avoir réussi, tout est plus simple et moins stressant.
On décide même de s’arrêter à Biscarosse pour couper le trajet et se mettre à l’eau en surf.
Ce confinement nous a secoués dans nos habitudes. Nous avons coutume de chercher le paradis toujours un peu plus loin et cette année nous l’avons trouvé chez nous.
À l’heure où le monde entier est confiné, où la dette mondiale bat des records, où les scientifiques travaillent jour et nuit pour trouver un vaccin contre ce virus, il y a nous, quatre humains dans un camping-car vivant du vent et profitant de ce que la France a à nous offrir.
Voltaire disait : « J’ai décidé d’être heureux parce que c’est bon pour la santé. »
Et si le bonheur était la clé de tout ça… Et si vivre à 200% était le meilleur remède contre ce virus ? C’est en tout cas ce qu’on a décidé de faire chez MANERA.
Olivier Sautet